Cafés et restaurants, la ruée vers les terrasses

Imaginez-vous attablé au milieu d’une clairière, entouré de boulots, de fougères et de lierre. Cette expérience, EquipHotel vous propose de la vivre … en pleine ville. Le salon a offert carte blanche à Pierre-Alexandre Risser pour créer un écrin vert. La Terrasse, dans le pavillon 7.3, proposera aux visiteurs de déjeuner ou de diner en pleine nature, complètement déconnectés de l’environnement urbain qui les entoure. Pour réussir cet exploit sur une petite surface, le paysagiste et son équipe d’Horticulture & JARDINS vont reproduire un « jardin forêt », capable de stocker le carbone, d’apporter de l’ombre et d’attirer oiseaux et insectes. Les troncs d’arbres créeront des jeux de lumière et donneront l’impression de multiplier les espaces. Le jardinier met ici en pratique une conviction qui l’anime dans ses créations végétales : « bien plus que des instants de détente, la terrasse offre des moments d’émerveillement et d’émotion exceptionnels. »

La terrasse au service des émotions

En imaginant ainsi un lieu qui ne séduit pas seulement la vue mais sollicite les autres sens — par la mélodie du vent dans les branches ou la caresse d’une écorce —, un endroit propice à la relaxation dans un univers trépident, La Terrasse répond à une demande croissante des Français qui attendent du restaurant davantage qu’une bonne cuisine. 64 % déclarent en effet y aller pour passer un bon moment, devant le fait de bien manger, motivation principale pour seulement 59 % d’entre eux (enquête Qualimétrie/Vertone, 2019).

Deux attentes qui ne sont bien sûr pas incompatibles. L’atmosphère et la végétalisation peuvent même se mettre au service de l’assiette. Les jardins de l’hôtel La Réserve ont par exemple été réalisés sur le thème du voyage, en écho à la carte qui propose des plats du monde entier. Au cœur du VIIIe arrondissement, à deux pas des Champs-Élysées, dans le patio de La Pagode de Cos, une des deux adresses de Jérôme Banctel à La Réserve, le client est transporté sur la route des épices grâce aux mets d’Italie, de Chine, du Levant ou d’ailleurs, mais aussi grâce aux plantes et aux parfums de fleurs exotiques. À la campagne, l’extérieur prolonge l’identité d’un établissement et accompagne le paysage. Devant la table triplement étoilée de Régis Marcon à Saint-Bonnet-le-Froid, en Haute-Loire, des plantes aromatiques et alimentaires ont été plantées au sein des massifs qui ressemblent à des feuillages.

Partager l’espace public

Il faut noter que le Covid a renforcé cette exigence expérientielle puisque le lieu physique est désormais en concurrence avec la livraison et le click&collect, plus fréquemment proposés, même par des restaurants de qualité. Dans les grandes villes, la rue devient un prolongement du domicile qui tend à rétrécir et les confinements ont renforcé l’amour des Français pour les terrasses. S’y installer le temps d’un café ou d’un déjeuner fait désormais partie d’un art de vivre revendiqué. Et avec la pandémie, cafés et restaurants ont récupéré une surface extérieure qu’ils n’auraient jamais pu obtenir en temps normal. À Paris par exemple, la Mairie a reçu des milliers de demandes pour que les espaces ouverts en pleine crise sanitaire deviennent durables. Les terrasses éphémères sont devenues saisonnières, autorisées chaque année du 1er avril au 31 octobre. Quelques mètres carrés supplémentaires de trottoir qui ont un goût de victoire car les professionnels savent d’une terrasse peut représenter 30 % du chiffre d’affaires d’un établissement, parfois beaucoup plus.

Mais tout le monde ne se réjouit pas et des associations de riverains dénoncent des nuisances accrues, notamment sonores. « Il n’y a que peu de mauvais élèves » répond Romain Vidal. Le secrétaire général du Groupement National des Indépendants de l’Hôtellerie-Restauration (GNI) Paris Île-de-France, lui-même directeur de la brasserie Le Sully dans le 4ème arrondissement, a collaboré avec la Mairie de Paris pour la conception et la mise en pratique du nouveau Référents des Terrasses parisiens (RET) et un bilan doit être réaliser à la fin de l’année.

Romain Vidal reconnaît toutefois « qu’il est possible de mieux faire pour les commerçants, les usagers et les riverains. » Le premier syndicat francilien (deuxième sur le plan national) a d’ailleurs réfléchi à la terrasse d’aujourd’hui et de demain et a fait plancher un bureau d’études et l’agence de design RF Studio sur le sujet. Les conclusions ont été présentées aux acteurs publics.

Pour le bruit, il existe des solutions encore peu exploitées en France comme les nudges, littéralement « coups de coude » conçus pour modifier nos comportements au quotidien, sous la forme d’une incitation discrète. Quand une terrasse est trop bruyante, des lumières qui clignotent inciteraient par exemple ses occupants à baisser de ton automatiquement. Concernant la sécurité, autre point d’amélioration à cause notamment des vols à l’arraché, Romain Vidal rappelle qu’un lieu où il y a un commerce apporte plus de sécurité qu’un lieu vide. Côté look, des règles ont également été établies, comme le fait d’utiliser un mobilier très léger, sans ancrage au sol. Exit désormais les planchers parfois de bric et de broc.

Un espace contraint

Une terrasse, qu’elle soit estivale ou permanente, a donc des contraintes propres. La végétalisation, dorénavant encouragée par l’Hôtel-de-Ville, doit s’adapter aux saisons. Il faut éviter que le pollen des fleurs ne se dépose sur les tables et attire les guêpes ou que leur parfum trop envoûtant ne gêne l’expérience culinaire.

Sur les terrasses aussi, le développement durable doit être pris en compte. Depuis le 31 mars dernier, il est interdit de chauffer ou climatiser les terrasses des cafés, bars et restaurants, ou de tout espace public extérieur. Cet hiver, fumeurs et amateurs d’extérieur vont devoir se contenter de plaids. Pour s’adapter au réchauffement climatique, Pierre-Alexandre Risser privilégie des plantes peu gourmandes en eau et adapte les méthodes culturales, en laissant par exemple les feuilles dans les massifs, paillage végétal naturel qui favorise le développement de micro-organismes à même de remonter des nutriments et de l’eau aux racines des plantes.

Pour prolonger la réflexion et découvrir les nombres possibilités qui s’offrent à la terrasse de demain, lieu d’expérience respectueux de la nature comme des riverains, EquipHotel propose une conférence sur le thème « Terrasses : comment les repenser de façon plus durable ? » mardi 8 novembre à 11h30 aux (Talks Architecture & Design, pavillon 7.3). Ne la ratez pas !

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